On y pense avant,
Tellement c'est excitant !
C'est parfois la routine quand la patine y est,
Mais faut bien y aller, pour ne pas décrocher !
Y a les petits malins qui s'yeutent l’ordre du jour
Préparant des répliques pour paraître au top ,
Et aussi les vrais profs qui polissent leur cours,
Les poètes, quant à eux, ont le nez dans leurs notes,
Pour un sujet ardu, on risque la somnolence
Ou le retour de flamme en cas de turbulences,
Mais toujours du sérieux et une pointe d’élégance !
Le jour même, il faudra veiller à se faire beau,
Pour les méticuleux, des décors sans défaut.
Les flemmards chercheront au fond d’un vieux tiroir
Un pochon chiffonné avec des gants bien noirs.
Le costume cravate noire est souvent préféré,
Le jean, pull, col roulé, est quand même toléré,
Un parfum de toilette ou la barbe de trois jours,
Des barbus militants ou ses crânes rasés,
Tous seront là, en avance ou souvent en retard !
Et puis on est entré, direction les parvis, qui nous font patienter.
Salutations faciles et celles qui le sont moins.
Trois bises obligatoires, Comment vas-tu ? Bien, et toi !
Visages connus et inconnus, petites affaires perso ou sujets à la une,
Des conversations reprennent où elles en étaient restées,
D’autres s’aventurent sur des sujets tordus !
Il y a les habitués, comme des poissons dans l'eau,
Les pt’its nouveaux inquiets sous l'œil des anciens,
Et parfois les illustres, admirés, jalousés et souvent chouchoutés !
Il est bientôt temps de mettre ses décors,
Symboliques bien sûr, mais aussi hiérarchiques !
Tablier, cordon, gants blancs, pour être tous égaux et bien sûr différents !
Le tablier, blanc, bleu, rouge, jaune, ça dépend !
Le jaune c'est pour les huiles qui rentrent tambour battant,
Sans parler des grades hauts, où s'ajoutent des images !
On peut aussi trouver des robes ou des blouses,
Et parfois des chapeaux, des calottes ou des voiles !
Chaque loge a son style, sa personnalité !
Avec beaucoup de variantes dans l'uniformité !
Tout ce monde s'adore et bruisse de ce doux son qu'on nomme fraternité !
L'oeil exercé dénote quelques originaux, et aussi les discrets !
Les hommes sont des frères et les femmes des soeurs
Car le sexe reste caché et toujours redouté !
Et puis le vénérable ou un autre officier
Donne le signe qu’on attend :
Prélude indispensable à l'entrée dans le temple !
Le silence lentement s’impose à l’assemblée.
Sagement, les entrées dans le temple en pénombre
Nous amènent à des places bien souvent habituelles.
Les paroles sont dites entre deux coups de maillet,
Le décor transformé par l’éclat des bougies,
Semble rayonner sur les visages figés !
C'est un moment magique, Egrégore orgasmique, inconstant et fugace ?
Les lumières s’imposent, disparaît la magie et le travail doit commencer !
Il y a l’ordre du jour, moments de relâchement,
Les excuses, le courrier, souvent sans intérêt ;
Et puis un ou deux temps forts ou comme tels espérés
Authentiques et poignants ou parfois assommant !
A la fin du sujet, selon l’humeur ou l’intérêt,
Les mains se lèvent ou se mettent claquer !
Moments incontournables pour permettre à chacun
D’apporter une pierre et souvent un ego,
On libère une envie, on cède avec entrain,
Au devoir d’encenser ou au coup de sabot !
Les habitués ont leurs manies, les virtuoses jouent du violon,
Les timides la font d’un jet avec souvent beaucoup d’émotion.
Il y a aussi le jeu où chacun joue son rôle,
Dans des échanges courtois qui cherchent à être drôles.
Mais certains sujets fâchent qu’il faut éviter,
Tâche ingrate du véné pas toujours aux aguets,
Laissant parfois filer le serpent malicieux
Inspirateur malin des petits facétieux !
Pour certaines tenues,
Un choix est demandé, un vote organisé ;
Et voilà toutes ces boules qu’il faut manipuler !
Boules blanches, boules noires
La passion monte d’un cran, car l’enjeu sans importance
Enflamme les esprits et suscite l’impatience !
Et puis c’est le grand bleu, et le temps du pardon :
C’est la chaine d’union, ce moment d’émotion,
Où les mains réunies cherchent à faire oublier
Les failles fraternelles qu’il nous faut occulter.
Il est temps de conclure, car le temps est compté.
Pour fermer les travaux, on reprend le rituel
Eteindre les lumières et arrêter de jouer !
On secoue ses méninges pour sortir de ce rêve
Et reprendre la posture des profanes éclairés.
Le bruissement des murmures essaye de s’imposer
Mais comment l’éviter après tant d’émotion et parfois de passion ?
Il y a ceux qui s’en vont,
Souvent discrètement,
Et ceux qui se prolongent pour le temps des agapes,
Défouloir obligé d‘une tenue réussie.
Agapes des apartés et des affinités,
Nourriture partagée, boissons non limitées,
Autre lieu, autre scène, spectacle assuré.
Le temps poursuit son œuvre,
Il faut se séparer !
Il y a de la tristesse ou du soulagement,
Dans l’échange des trois bises,
Viatique incontournable d’un retour aux réalités !
Et, c’est quand la prochaine ?
Extrait du recueil de poèmes "Emotions maçonniques" - Edition Edilivre 2021
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