Pour les vacances, voici une nouvelle édition de cette revue maçonnique de qualité que produit la Grande Loge de l'Alliance Maçonnique Française sous la responsabilité de Jean-Claude Tribout. Le thème en est "Du travail à l'oeuvre - quand la création donne sens". Paradoxe de réfléchir au travail en vacances penseront certains mais c'est oublier que le-la maçon-ne n'aspire pas au repos !
Au sommaire
Fred PICAVET (directeur de publication Grand Maître de la GL-AMF) : Avant-propos : Se mettre à l’œuvre. Le Grand Maître de la GL-AMF présente le sujet de façon très personnelle.
François-Xavier TASSEL, « Maçons de tous les pays, unissez-vous ! »
C’est un beau texte que nous offre François-Xavier Tassel en « refaisant le match » et en reprécisant les différents sens du titre de ce dernier numéro de la revue, qui il faut le noter ne se limite pas à la compréhension maçonnique du terme. C’est d’ailleurs le sens maçonnique que l’on pourrait donner à ce « Du travail à l’œuvre » qui semble poser problème. Il montre combien, comme toujours dans l’approche symbolique maçonnique, le contenu biblique est primordial. L’auteur de l’article n’aborde cependant pas une approche maçonnique plus contemporaine de cette œuvre collective que l’on est appelé à construire.
Francis BARDOT, L’artiste et l’initié, une « Fantaisie écossaise »
François Bardot aborde le sujet en développant le concept classique de l’inspiration divine comme unique critère de tout ! Alors bien sûr on évoque Mozart et aussi Beethoven qui fait l’objet d’une longue citation ! C’est bien écrit mais n’est-ce pas une approche un peu passéiste ?
Gaston-Paul EFFA, Enseignant et initié - La récolte de la rosée ou le travail comme éveil
Aborder la notion du travail et de la création en faisant jouer un rôle à l’enseignant, au Maître, tel est le choix du professeur de philosophie qu’est Gaston-Paul Effa. Aujourd’hui on voit bien que ce rôle est devenu un fantasme mais il fait toujours rêver.
Jacques di COSTANZO, Médecin et initié - Le travail comme dévouement
C’est un angle très particulier qu’a choisi Jacques di Constanzo pour traiter la question. Il n’est naturellement plus question de franc-maçonnerie ni de symbolisme mais d’action sociale. Médecin de profession il n’a pas choisi d’aborder la question du travail de la parturiente qui a les faveurs de l’avant-propos de Fred Picavet.
Paroles de Maçons, Cadres et initiés - En dehors du Temple, le travail au XXI e siècle
C’est une approche originale qui est proposée dans cet article qui résume les réflexions de six frères réunis par Gaël de Kerret. Les citations des participants démontrent une spontanéité sympathique mais très superficielles ; comme un préalable à une séance d’instruction ? La reprise de la fable de Charles Péguy sur les trois casseurs de cailloux interprétée par le psychiatre Boris Cyrulnik aurait mérité plus de développement car s’arrêter au premier sens apparaît réducteur.
Irène MAINGUY, La glorification du métier, une utopie de notre temps ?
Irène Mainguy, fidèle à son extraordinaire connaissance des livres, initie son propos en partant de la fonction des outils et des gestes. Ensuite vient le sens du travail et les directives formalisées ou non. On en vient aux conditions fondamentales (nécessité, sanctification et perfection) mais est-ce que tout cela a encore un sens aujourd’hui ?
Jean DUMONTEIL : Post-scriptum : Méditation sur le travail et l’œuvre
Le directeur de la rédaction des Cahiers de l’Alliance, avec la rigueur qu’on lui connaît, se consacre à l’approche maçonnique en privilégiant sa vision personnelle de la spiritualité. Pour notre frère, le travail serait de créer (par l’initiation) et de transmettre ! Le deuxième terme aurait bénéficié d’un développement. La référence au travail de la parturiente semble bien poétique !
Cahiers de l’Alliance
Directeur de la rédaction : Jean Dumonteil
Rédacteur en chef : Jean-Claude Tribout
Une publication de la Grande Loge de l’Alliance Maçonnique Française
Editions Numérilivre
Prix : 18 Euros
Que dire d’autre ?
C’est un sujet fondamental et, comme cela a été dit par un contributeur, pour la plupart des francs-maçon-ne-s, ce n’est pas clair du tout !
Si on admet que le travail est d’abord une activité qui doit produire un changement (une œuvre) peut-être pourrait on admettre que l’activité dont il s’agit comprend :
- La lecture
- L’écoute
- L’observation
- L’élaboration conceptuelle
- La rédaction de textes
- La gestuelle
On pourrait rajouter :
- La méditation
Le changement consécutif à cette activité pourrait concerner une modification :
- des comportements
- et/ou des conceptions idéatoires.
Comme les différentes contributions de ce numéro le montrent, le sujet est abordé aussi bien sur le mode profane que maçonnique !
Su le plan profane, on ne retrouve pas de réflexion sur la dévalorisation du travail dans le monde profane ; c’est pourtant une évolution récente qui est constatée et qui inquiète.
Sur le plan maçonnique, la première recherche que l’on pourrait imaginer serait d’évaluer la réalité du travail par les sœurs et les frères et l’évaluation des changements observés.
A ma connaissance, aucune étude n’a été réalisée pour apprécier cette réalité.
Les articles offrent des pistes de réflexion ; on y retrouve, en particulier, l’inspiration biblique des rituels maçonniques que l’on pourrait illustrer par la réponse à la question « Quel est le but principal de la vie de l’homme ? », « Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu et de trouver en Lui son bonheur éternel ». (Question n°1 du petit catéchisme de Westminster).. Celle-ci est-elle encore d’actualité dans une démarche maçonnique contemporaine ouverte sur le monde, les cultures et les différentes approches spirituelles ?
Pour résumer, il a été question :
Du travail-pénitence, cher aux religieux de tous poils qui n’envisage pas la vie terrestre autrement que dans la souffrance si on veut accéder à la béatitude paradisiaque post-mortem !
Du travail-soumission, jouissance de celui qui sacrifie sa vie pour Dieu, son seigneur, sa famille ou les autres (voire les malades) !
Du travail-joie du geste bien fait et de la beauté de l’œuvre, que l’on y mette du mysticisme ou de l’esprit artistique.
Du travail-perversité qui permet la domination de l’autre, sa déshumanisation et son instrumentalisation !
On aurait aussi pu rajouter le travail comme une nécessité, pour vivre et être libre, pour exister en qualité d’être authentique, pour partager avec l’autre dans une dimension fraternelle, en un mot pour être franc-maçon-ne !
Il y a aussi un travail qui n’a pas été abordé par les contributeurs ; celui qui concerne l’étude de la morale. Ce sujet m’apparaît à la base d’une réappropriation du travail en loge non pas sur des concepts nébuleux et passéistes mais sur une réelle confrontation entre les vécus, avec ses contraintes, et les désirs et obligations relatifs aux exigences de l’engagement maçonnique. La contribution collective des six frères aurait peut-être pu déboucher sur une réflexion de ce type.
Pour aller plus loin :
- Un article avec le même titre « Du travail à l’œuvre » par Jawad Mejjad dans « Sociétés » 2007/4 (n° 98), pages 87 à 93 (on y lira avec intérêt l’allusion au concept d’homo faber dans l’œuvre de Hannah Arendt)
- La conception du travail dans la Bible et dans la tradition chrétienne occidentale par Aldina Da Silva
- Une interview de Vincent Box, artiste peintre street art, qui parle de son travail de création : video ci-dessous :
- CRÉER C'EST TRAVAILLER. MAIS COMMENT TRAVAILLE-T-ON À INVENTER ? PICASSO ET RODIN À L'ŒUVRE (voir la video ci-dessous)
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