Le port des gants
Si le port de gants se comprend aisément lorsqu'il est question de se protéger ou de protéger l'autre d'une éventuelle contamination, mais en matière de symbolisme, le port des gants s'interprète avant tout comme un élément de hiérarchie sociale rentrant dans le cadre de l'habillement.
Bien que les gants et le tablier sont portés par les francs-maçons depuis les premières loges anglaises et écossaises par filiation avec leurs origines compagnonniques, les usages maçonniques se sont alignés sur ce qui se faisait dans la noblesse tout en lui rattachant une valeur éthique. Dans la plupart des cas, il s'agit de gants blancs, dans certains degrés, on porte des gants noirs ; dans certaines loges, seuls les officiers en portent.
Certains gants sont décorés d'une feuille d'acacia , d'autres de l'équerre et du compas, d'autres encore de trois points !
Pour éviter une disparité gênante des usages, les loges les plus sérieuses précisent exactement ce qu'il est convenu d'en faire.
Faut-il enlever ses gants avant de donner son obole ?
C’est une question basique pour les sœurs et les frères des loges qui ont gardé cette ancienne tradition ; elle suscite des réponses variées :
Oui, parce qu’il ne faut pas souiller ses gants avec l’argent considéré comme un métal impur ?
Non, parce qu’il ne faut pas souiller ses mains avec l’argent considéré comme un métal impur ?
Oui, parce que donner est un geste du « cœur » !
Non, parce qu’en loge, du début à la fin de la tenue, les gants doivent toujours être portés !
Rappelons que le port des gants blancs depuis les premières loges anglaises peut être lié au fait qu’à cette époque c’était un attribut des dignitaires de l’église. Dans les anciens rituels, des gants blancs étaient offerts aux nouveaux initiés avec une paire pour eux et une paire pour la femme qu’ils chérissaient. A chaque nouvel initié il était rappelé « qu'un Maçon ne doit jamais tremper ses mains dans l'iniquité.» (Comme l’Histoire prouve que les obédiences maçonniques ont une définition pour le moins laxiste de l’iniquité, on comprend que dans des loges on ait abandonné le port des gants blancs qui ne correspond plus vraiment à l’obligation morale qu’il est censé symboliser).
Dans le monde profane, les gants faisaient partie de l’habillement de l’aristocratie, puis de la bourgeoisie et aussi de l’armée ; il était coutume, en ce qui concerne les gants :
de les enlever ou de les garder, avant de serrer la main de celui ou celle que l’on veut accueillir ou saluer ; plusieurs explications sont apportées pour expliquer cette différence d’attitude : comme par exemple la peur ancienne d’être empoisonné, l’âge des interlocuteurs, le genre, etc.
dans l’armée, ils font partie des tenues de catégorie 1 portées par les officiers et les sous-officiers lors des réceptions publiques ou privées (codes interarmées : A1, A2, A3) obligatoires pour les manifestations officielles et dans ce cas, ils ne sont jamais enlevés !
Chacun sait que les rituels sont des conventions et que l’important, c’est que chacun comprenne et soit compris pour les gestes qu’il est amené à réaliser.
En loge, il y a deux moments importants où le rituel précise qu'il faut enlever ses gants :
- lorsqu’on prête serment
- et lors de la chaîne d’union.
Par ailleurs, par notre filiation compagnonnique, les gants nous renvoient au travail ; pour travailler correctement, nous avons besoin de gants d’une part pour protéger nos mains et d’autre part pour mieux manipuler les outils.
Ce rappel permet de s’interroger sur certaines affirmations : N’y aurait-il pas une confusion entre la couleur blanche des gants et les gants eux-mêmes ?
La logique de la démarche maçonnique privilégiant, l’authenticité et la volonté de servir, on peut comprendre que l’acte de donner une obole par une main dégantée affirme une volonté charitable.
Le port des gants peut être compris comme un symbole d’une participation au travail, et la couleur blanche des gants se rapporte à la nature du travail en rapport avec la Justice et le dévouement !
Le port des gants n’altère pas la qualité intrinsèque du contact charnel de la main qui symbolise l’engagement individuel et le respect des valeurs maçonniques.
Si on souhaitait réaliser une hiérarchisation des valeurs symboliques de ces trois éléments on pourrait les placer dans cet ordre décroissant :
1. La main nue : elle nous renvoie à notre authenticité,
2. La couleur blanche : elle symbolise la pureté de nos intentions,
3. Les gants : ils évoquent notre goût pour le travail et la recherche.
En conclusion, oui, on doit enlever ses gants avant de déposer une obole dans le tronc de la Veuve, pour les mêmes raisons qu’on se dégante avant de prêter serment ou avant de se placer dans la chaîne d’union.
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