Les trois polarités d’une tenue maçonnique
Le vécu maçonnique, dans sa loge et lors des visites effectuées, peut être global mais il peut aussi s’analyser. Nous vous proposons une grille de lecture qui distingue les trois polarités d’une tenue :
1. le respect du rituel,
2. la nature des échanges
3. et la qualité du contenu.
La polarité rituélique :
Quel que soit le rite utilisé par la loge, chaque loge a sa manière propre de le mettre en scène : cela concerne le respect des différents moments rituels, l’absence d’erreurs ou d’hésitations pour les officier(e)s, la qualité des participations de chacun, la « scénarisation » et la capacité à créer « l’égrégore » ; certains rites sont plus exigeants mais même un rite dépouillé suppose un investissement de la part de celles ou ceux qui le mettent en œuvre.
La polarité des échanges :
Il s’agit de mesurer l’authenticité des participations, la capacité des frères et sœurs à faire part de leurs vécus, l’absence d’interventions plus ou moins « folkloriques », l’absence d’effets oratoires.
La polarité de la réflexion :
Cela concerne essentiellement la qualité des planches et des interventions, la capacité d’aborder des thèmes spécialisés, l’aisance dans la vulgarisation de travaux scientifiques.
Si on positionne sur les trois rayons d’un cercle, les trois polarités, chaque tenue maçonnique pourrait être schématisée par un triangle réalisé en reportant sur les trois axes des polarités la mesure du qualitatif de chaque polarité pour la tenue considérée, cotée de 0 à 9, en partant du point 0 central.
La tenue idéale, pourrait être celle où la qualité des trois polarités est respectée ; on peut la représenter par le triangle parfait équilatéral s’inscrivant dans le cercle.
Trois grandes catégories de tenues maçonniques :
L’analyse du déroulement d’une tenue permet de déterminer trois groupes selon l’importance relative prise par chaque polarité ; schématiquement ces trois groupes peuvent être visualisés sur un positionnement extrême ; dans la réalité, l’analyse est moins caricaturale et les situations intermédiaires sont les plus fréquentes.
La tenue type « café du commerce » (voir schéma c-dessous) :
Cela concerne des loges qui ont pris l’habitude d’accepter une grande familiarité avec un minimum de contraintes ; chacun peut s’habiller comme il veut ; la camaraderie est belle à voir mais on voit bien que dans ces tenues « on se casse pas la tête » ! Les «faut qu’on » et « y a qu’à », le non-respect des pratiques rituelles et les jeux de rôle des uns et des autres donnent une tonalité qui peut être sympathique mais au final assez «vide» de sens ! La loge est alors un excellent lieu de rencontres conviviales mais le risque est grand d’un certain «épuisement » !
La tenue « intello » : (voir schéma ci-dessous)
Elle se voit dans des loges dites de recherche ou dans certaines loges des ateliers dits « supérieurs » avec des planches de grande qualité, mais sans véritables échanges et avec un environnement rituel chaotique et très « à peu près » ; c’est aussi le cas lors de planches présentées par un « expert ». La qualité du travail présenté est en décalage avec la capacité de compréhension des membres de l’atelier et le présentateur ou la présentatrice ne fait pas vraiment l’effort d’être compris-e par toutes et tous. Dans ce contexte, le suivi du rite peut passer au deuxième plan.
La tenue type « messe » (voir schéma ci-dessous) :
Elle se voit dans les loges pratiquant un rituel où on privilégie l’approche symboliste ; il s’agit de faire du rituel et rien que du rituel sans une réelle réflexion ni participation autre que formelle.
Cette schématisation permet de mieux comprendre la difficulté à assurer une harmonie entre les trois polarités afin de répondre à la spécificité du travail maçonnique.
A propos du livre "Hiram et Freud" de MH Gonnin et J Fontaine
Jacques Fontaine et Marie-Hélène Gonnin ont écrit un ouvrage de référence ; "Hiram et Freud" se veut un éclairage psychanalytique sur la démarche maçonnique. Ils ont été interviewé par Daniel Videlier pour Baglis TV - Les extraits présentés ci-dessous doivent vous inciter à lire ce beau livre. L'intégralité de l'interview est à voir sur BaglisTV.
Marie-Hélène Gonin explique pourquoi le travail maçonnique a tendance à "conditionner" les francs-maçons vers un comportement obsessionnel. C'est un risque qu'il faut connaître pour ne pas y succomber !
Evolution du lien social avec le vieillissement
Autre particularité de l'engagement maçonnique : statistiquement les francs-maçons sont très majoritairement des personnes âgées de plus de 65 ans.
Cette réalité s'explique mais elle mérite qu'on en tienne compte ! Le diaporama ci-dessus a été présenté lors d'une conférence du Professeur Gaucher à propos de la problématique de l'évolution du lien social avec le vieillissement.
Une réalité historique : le rôle des loges maçonniques dans la socialisation
S'il y a une action bénéfique que l'on peut reconnaître aux loges maçonniques depuis leurs créations, c'est bien d'avoir jouer un rôle actif dans la socialisation des minorités. Ce fut le cas en particulier pour les juifs de France au XIXème siècle (voir ci-contre).
Juifs et franc-maçonnerie au XIXe siècle. Un état de la question, parJean-Philippe Schreiber
Jean-Philippe SCHREIBER est maître de recherches au Fonds National de la Recherche Scientifique (Belgique) et professeur à l’Université Libre de Bruxelles. Spécialiste du judaïsme en Belgique, auteur de nombreux ouvrages, il a notamment assuré la direction scientifique de : Les Curateurs du ghetto. L’Association des Juifs en Belgique sous l’occupation nazie (2004), avec Rudi Van Doorslaer ; Théologies de la guerre (2006) ; Laïcité et sécularisation dans l’Union européenne, avec Alain Dierkens (2006).
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